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26 août 2009

Torin Cormac Ó Loingsigh - partie 1

Puisque j'étais un peu remontée contre le site qui a planté juste quand je postais mon article l'autre jour, je n'ai pas eu le courage de recommencer, et donc je profite d'être en pleine rédaction de la fiche d'un personnage pour Fallen (ça n'est que le quatrième...) pour poster, puisque l'histoire est assez compréhensible hors contexte et qu'elle me permet de ne pas avoir à réfléchir à une manière de poster ici alors que je manque de temps. Torin Cormac Ó Loingsigh, donc, vampire depuis la fin du 15eme siècle et qui raconte son histoire. C'est pour le moment la partie concernant sa vie humaine, le reste n'est pas encore écrit et arrivera plus tard, en quatre autres parties normalement, et sans doute postées d'ici la fin de la semaine prochaine.


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Pour beaucoup, le nom n’est que superficiel. Un outil. Pour moi, c’est beaucoup plus. Mon nom est ce que je suis. Mon histoire, ma destinée. Je suis mon nom. De ma conception à aujourd’hui, je suis toujours le même, quelque soit le chemin emprunté et les changements flagrants qui m’ont affecté. Je suis Torin Cormac Ó Loingsigh. De la première à la dernière lettre, à chacun de mes souffles. Comme une marque indélébile tracé à même la chair. Chacun son fardeau. Torin Cormac…

Si le premier de ces deux noms était un présage pour ce que je deviendrais, pour ma vie après la mort, mon errance éternelle, le second reflète le drame de mon existence humaine. « Fils de celui qui rend pourri ». Ma mère aimait mon père d’un amour sans limite, ce nom le montre bien. Une ordure qui m’avait offert à elle. Ou plutôt, comme je l’ai souvent entendu le dire, qui m’a arraché à elle. Mais il ne faut pas croire qu’elle ne m’aimait pas. Eimhear** était une bonne mère. Je pense simplement qu’elle avait une peine toute particulière à réussir sa vie, à faire les bons choix. Je pense aussi que dans sa tête un peu vide, elle aurait aimé me garder pour elle, me protéger du monde. J’étais son fils, et on le lui avait enlevé pour l’obliger à souffrir une vie qu’il ne méritait pas. Et puis, malgré cet amour inconditionnel, il y avait la haine de l’homme qui m’avait engendré. Le dégoût inspiré par son corps, par son être tout entier, et par la pourriture qu’il avait fait naître en elle. J’étais le fils de ça. De cette chose. Et il y avait la honte, aussi, de l’Irlandaise qui voit son sang souillé.

Ó Loingsigh. Petit fils du marin. Petit fils de l’étranger qui était arrivé sur nos côtes, et qui passait son temps en mer. Petit fils de l’Anglais. Car c’est ce qui dégoûtait ma mère. L’anglais avait fait d’elle sa chienne, et elle ne supportait pas l’idée de mêler son sang à celui d’un voisin, bien qu’à l’époque, l’Angleterre ne marchait pas encore sur nos Terres. Il était son colon personnel, son envahisseur tant haï. Elle avait choisi ce nom, Ó Loingsigh, pour que je n’oublie pas mes origines bâtardes sans pour autant m’affubler d’un nom plus clair, plus réel, qui aurait fait de moi un étranger, comme mon père. Ainsi, je peux toujours prétendre que mon sang n’est qu’Irlandais. Je suis le bâtard, mais je suis de chez nous. C’est ce qui compte réellement. Un nationalisme sans limite, ridicule et dont j’ai hérité. Sans doute à cause de cette éducation que par la suite, je n’ai que très rarement quitté l’Irlande, malgré mes longs siècles d’existence.

Délicieux nom que le mien. Et mon enfance, ma vie humaine, est à son image. Je n’ai pas été exagérément malheureux, je n’ai pas non plus joui d’un prestige sorti d’on ne sait où, ni d’une culture époustouflante. J’ai vécu avec mon siècle. Avec les autres, noyés dans la foule, à ceci près que je restais la pièce rapportée, quels que soit les efforts faits par ma mère pour m’offrir tout ce qu’elle avait. L’imbécile. Son amour mêlé de haine, ses sentiments trop forts… Si je n’étais pas mort si jeune, si les battements de mon cœur n’avaient pas cessé sous les crocs de mon premier et unique maître, Elle m’aurait très certainement tué de ses sentiments dévorants. Une pieuvre. Mon Eimhear, ma chère maman était une pieuvre dont les tentacules d’une folie douce vous cajolaient, vous enserraient et vous détruisaient. Elle ne parvenait à rien, la pauvre. Pas même à mener une vie digne de ce nom. Pas même à résister aux assauts de mon bon à rien de père. Ni à ceux des autres non plus. Ma belle, ma douloureuse Eimhear… Elle ne parvint même pas à s’empêcher de me mettre au monde, avec sa volonté chancelante et ses grands espoirs.

Et c’est ainsi que j’ai grandi. Dans les vagues violentes d’une maison malheureuse. Au milieu de ces gens dont je suis incapable de dessiner les visages, aujourd’hui, bien que mes doigts se souviennent encore d’avoir cent fois tracé les traits de ma mère. Je ne sais pas vraiment quand j’ai commencé à les oublier, quand les sourires, quand les yeux ronds et bêtes, quand les airs furieux et les traits grossiers de mes proches ont commencé à s’estomper. Probablement lorsque je me suis levé, le premier jour de ma mort. Probablement la première fois que j’ai compris que j’avais gagné la vie éternelle. Ils ont disparus, tous, et ne laissent dans ma mémoire que l’empreinte d’une vague connaissance. Je sais que je les connais, je sais qu’ils me sont chers, mais je ne tiens pas à me souvenir. Je ne veux pas les voir. Je pense que je ne l’ai même jamais souhaité. Il est triste qu’ils ne s’en soient pas sortis, eux aussi. Surtout Eimhear. Mais je n’ai pas le moindre regret, et abandonner ma famille fut une chose facile.

Ces pantins, autour de moi, ont été mes modèles. Ma mère, par tout ce qui a été dit plus haut, et mon père, par sa violence et son indifférence, son amour malpropre et ses actes inconsidéré. Par sa force quand il s’adressait à ma mère, par son affection maladroite à mon égard, et l’application qu’il avait a tenter de faire de moi un homme. J’étais destiné à ça. Un mâle. Marin comme mon père et son père avant lui. Dans mon esprit, c’était toujours mieux que d’être ici. J’étais rêveur, bien que le rêve en ce temps n’avait rien à voir avec ceux que j’ai connu plus tard. J’avais connu les plaisirs de la chair, maintes et maintes fois, que ma partenaire soit consentante ou pas tout à fait (elles finissaient toujours par l’être), j’avais fait de moi un homme et laissé de côté ma peau d’enfant, et j’aspirais à découvrir le monde. C’était avant. Avant que tout dérape et que ma vie des plus banales soit frappée par les combats. Avant que je ne réalise que je n’avais pas la force, et certainement pas la sagesse de prendre la mer ainsi. Avant que je ne me résolve. J’allais être marin, comme mes pères avant moi, et je buvais à cette idée, la nuit où je suis mort. Une soirée phénoménale, qui m’avait laissé encore plus imbibée que la paille sur laquelle je cuvais mon whisky. J’étais Cormac, la pourriture engendrée par le démon qui salissait ma mère, et je m’apprêtais à devenir un chef, un combattant, un prédateur. Je laissais ma place d’homme misérable à un autre, pas vraiment près à m’élever, mais ravie de laisser la vermine derrière moi. Ma pauvre Eimhear, qui perdit son fils. Je pense qu’au fond, je l’aime encore.

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